Pour Pierre Etoile, le Duflot est « un avantage fiscal réaliste »
TRIBUNE - Pour Marc Gedoux, Président de Pierre Etoile, le dispositif Duflot permettra, tout comme le Scellier intermédiaire, la production d'un parc locatif accessible aux classes moyennes, tout en corrigeant les défauts de ce dernier.
Le nouveau dispositif de défiscalisation pour les investisseurs dans l'immobilier résidentiel a déjà fait couler beaucoup d'encre. Le Duflot a en effet la lourde tâche de succéder à un dispositif qui restera le plus puissant jamais créé depuis que l'Etat soutient les investisseurs particuliers, à savoir le Scellier. Il faut rappeler que l'avantage en question a été inspiré en 2008 par le député François Scellier, alors que le pays entrait dans une crise économique sans précédent, et que le secteur immobilier comptait parmi les plus éprouvés. Sauver l'activité immobilière, les entreprises du bâtiment et les emplois était l'urgente priorité, et le plan de relance du gouvernement n'a pas lésiné. Le résultat a été un dispositif puissant, dont les performances ont atteint 55 000 opérations d’investissement locatif dès 2009, et jusqu’à 73 000 unités en 2011.
La recette était simple : une réduction d'impôt en pourcentage du prix du logement, conditionnée à des plafonds de loyers proches des prix du marché, assortis, à compter de 2011, de conditions de revenus des locataires rendant éligible près de 90% de la population. Pendant la campagne présidentielle, le message du candidat Hollande a été clair : un avantage en terme d’investissement locatif serait maintenu, mais dans un cadre social, avec un plafonnement de la niche fiscale établi à 10 000 € par foyer. Cécile Duflot a mis en musique cette promesse. La plupart des commentateurs, notamment professionnels, mettent en exergue que le nouveau dispositif est assorti de toutes les contraintes du monde, et qu'il en perd tout attrait pour l'investisseur. Cette thèse est pour moi infondée. Si l’on compare les préceptes du Duflot à ceux du Scellier, il est certain que les critères d'éligibilité - codifiés dans le décret du 29 décembre 2012 - se rapprochent de ceux du feu Scellier dit « intermédiaire », un Scellier à vocation plus sociale.
Pour le reste, le nouveau dispositif permet, au même titre que son prédécesseur, la production d'un parc locatif accessible aux ménages des classes moyennes, tout en venant corriger ses défauts. On tentera ici de préciser en quoi il apporte effectivement d'utiles réajustements. Le mécanisme général est peu ou prou conforme au Scellier, avec une réduction d'impôt de 18% étalée sur 9 ans, un investissement annuel maximum de 300 000 €, et un prix du logement plafonné à 5 500 € du m². Il propose néanmoins deux améliorations majeures. En premier lieu, le précédent taux de réduction n'était que de 13%, contre 18% actuellement. Ensuite, l'investisseur ne pouvait réaliser qu'un seul achat par an, alors qu’il peut désormais en accomplir deux.
L'obligation imposant au promoteur une proportion de logements en accession est une grande nouveauté règlementaire. Dans un souci de mixité sociale, au sein d’un même immeuble de plus de 5 appartements, seule une part limitée des logements peut bénéficier du dispositif (fixée par décret, dans la limite de 80%). Cette limitation du nombre de logements locatifs est une mesure de bon sens… même si elle n’évitera pas les dérives que l’on constate souvent dans les résidences « 100% investisseurs». En effet, plus l’on s’approche de la date de fin d’un dispositif d’incitation fiscale, plus l’entretien du patrimoine laisse à désirer. On assiste alors à des ventes simultanées de nombreux logements, ce qui a pour effet d’en diminuer la valeur moyenne. Dans tous les cas, c’est l’investisseur qui est pénalisé.
En fait, cette mesure ne va pas sans poser de problème au niveau du contrôle de son application : pénaliser le promoteur est assez aisé, mais comment imposer une sanction à un acquéreur qui, lors de la réservation, déclare vouloir occuper son futur logement et qui décide 2 ans plus tard, au moment de sa livraison, de le louer sous le régime Duflot? La contrainte verte est raisonnable, dans le sens où les normes retenues sont des normes auxquelles la quasi-totalité de la production répond déjà (label BBC Effinergie RT 2005 pour les programmes initiés avant 2013, et la RT 2012 pour les nouveaux programmes).
Il aurait été intéressant, comme pour le PTZ+, de booster un peu plus le dispositif pour les résidences qui feront l’effort de se labéliser HPE 2012 (Haute Performance Energétique, avec une amélioration de 10% par rapport à la RT 2012) et THPE 2012 (Très Haute Performance Energétique, avec une amélioration de 20% par rapport à la RT 2012). Janvier 2013 Les plafonds de loyers imposés correspondent à des loyers réduits de 20% en moyenne par rapport aux prix du marché, grâce à l'application d’un loyer mensuel maximum au m² (entre 16,52 €/m² et 8,59 €/m² selon la zone géographique) et d'un coefficient de pondération, prenant en compte la superficie du logement. Cette nouveauté prend en compte le principe selon lequel les prix au m² varient avec la taille des logements (plus élevés sur les petits logements et plus faibles sur les surfaces plus importantes). Le loyer d’un studio parisien pourra donc monter jusqu’à 20 €/m². C’est évidemment la contrepartie la plus forte demandée aux investisseurs... en apparence. Certes, la tentation du propriétaire de fixer son loyer au plus haut niveau absorbable est grande, et sur le papier la rentabilité (calculée grossièrement par le rapport entre les revenus locatifs et le prix d'achat) est optimisée par un loyer fixé à son maximum.
Dans les faits, depuis déjà deux ans, les retards de paiement et les impayés de loyer vont croissant et les propriétaires sont conduits, en particulier sur le conseil des administrateurs de biens, à modérer les loyers. Dans nombre de marchés de province, les valeurs locatives ont même été corrigées à la baisse. Pour le dire simplement, se placer en-dessous du marché, c'est minorer le risque d'impayés, le risque de vacances, le risque de turn-over des locataires et l'usure des logements. Par ailleurs, la catégorie de population, partout en France, en attente de locations dans le secteur privé est constituée très majoritairement de ménages aux revenus intermédiaires. En somme, les limites de loyer imposé par le dispositif ne ferment pas la demande, loin de là. Le plafonnement de revenus des locataires est corollaire de la limitation des loyers. Il évite que des ménages aisés, ayant accès à des loyers libres, ne profitent des loyers modérés par le dispositif, écrasant l'objectif social de la mesure.
Les niveaux de revenus retenus, rapportés aux loyers, permettent des taux d’efforts corrects - entre 25 et 30% - c'est-à-dire un confort budgétaire pour les preneurs et une sécurité financière pour les bailleurs. Le zonage du dispositif Duflot sera effectif de droit dans les zones Abis, A, et B1 du dispositif Scellier, c'est-à-dire dans les zones à forte et moyenne demandes locatives. Là encore, il s'agit de ne pas gaspiller l'aide publique et de préserver les investisseurs contre de mauvaises surprises, consécutives à des achats dans des communes où la demande locative est faible. On voit bien que le Duflot a des arguments pour séduire les investisseurs, et qu'une grande partie de son succès va tenir aux discours commerciaux. En toute objectivité, ce nouvel avantage est porteur d'atouts, au même titre que son prédécesseur. Son caractère complexe ne l’est finalement pas beaucoup plus que celui du Scellier « intermédiaire ». Il appartient simplement aux professionnels de l’immobilier de le décoder pour leurs clients, et de transformer les craintes et les interrogations en certitudes et en sérénité.
Par Marc Gedoux, Président de Pierre Etoile
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