« Les relations copropriétaires / syndics sont généralement bonnes » | Lyon Pôle Immo

« Les relations copropriétaires / syndics sont généralement bonnes »

Pour Jacques Pedrini, président de l’UNIS Lyon et Renaud Franchet, président adjoint, les copropriétaires doivent avoir une vision à plus long terme des copropriétés et une approche plus collective. Les copropriétaires doivent comprendre l’importance d’investissements réguliers.

En France et en Allemagne, les approches de la copropriété ne sont pas les mêmes. La conception de la copropriété doit-elle évoluer ?

Renaud Franchet - En Allemagne, les ouvertures sont considérées comme des parties communes. Et le problème en France est que cette analyse est vécue comme  une aliénation du sacro-saint droit de propriété. On  envisage de créer des parties communes d’intérêt général avec des modes de décisions qui, en l’état de la réflexion de nos gouvernants, paraissent être assez alambiqués. Le  casse-tête juridique va donc encore être amplifié. Plus le mode est compliqué, plus il sera facilement attaquable. On risque dont d’avoir une explosion du nombre de recours de  copropriétaires. Or, si on aboutit à une augmentation des procédures, on bloque les travaux… D’où des situations complètement folles…

Pour les fenêtres, si un copropriétaire estime que dans les dix ans passés, il a remplacé ses fenêtres, il peut dire « ce que j’ai fait il y a huit ans et demi équivaut à ce que vous allez faire aujourd’hui, donc je ne suis plus obligé de le faire ». Et, s’il fait valoir ça, le projet se trouve bloqué car il s’agissait de traiter tout l’immeuble. Que peut-on faire dans ce cas là ? Lancer les travaux avec le risque d’une prise en charge des travaux faits il y a 8 ans par le copropriétaire ? Ce sont des épées de Damoclès qui sont au-dessus des assemblées générales.

Y-a-t-il des parlementaires compétents ?

Jacques Pedrini - La difficulté à faire adopter ce type de décision dans une copropriété peut se résumer par un exemple concret. Je gère un immeuble où nous avons fait réaliser un diagnostic énergétique  financé par tiers par l’ADEME, le conseil régional et  les copropriétaires. On avait un magnifique document de 40 pages, présenté à l’assemblée avec différentes solutions pour économiser l’énergie: étanchéité de la terrasse, isolation par les façades, changement  des fenêtres… L’ensemble de ces travaux représentait un montant important et après de multiples discussions, la copropriété n’a pas voté de travaux persuadée que du fait d’un temps de retour sur investissement trop long, elle ne se sentait pas concernée par  l’étanchéité et la chaufferie … Les copropriétaires ont accepté de changer les minuteries parce que le coût de la dépense -1000 euros-  répartie sur l’ensemble des copropriétaires était ridicule.

Pourquoi ces attitudes?

Jacques Pedrini -La population est globalement vieillissante. Elle reporte souvent à plus tard les travaux en espérant qu’ils seront réalisés par les enfants. Cet exemple se retrouve partout… Lorsque vous proposez aux copropriétaires de s’inscrire dans la démarche du Grenelle de l’environnement ou du Plan Climat, de rénover des ascenseurs,  avec budgets de 25.000 à 80.000 euros par immeuble suivant les installations, le problème du financement revient.

Certaines dépenses ne sont-elles pas réellement justifiées, les ascenseurs par exemple?

Renaud Franchet- Le nombre d'accidents liés aux ascenseurs est très faible. Certaines réglementations sont légitimes, mais d’autres créent des situations ubuesques.  Mais, si un accident intervient dans un ascenseur vétuste délabré et hors normes, c’est la France entière qui va devoir revoir ses ascenseurs. Et tout l’argent mis dans les ascenseurs n’ira pas dans les économies d’énergie et la performance énergétique. Certes, les travaux sur les ascenseurs ont pour partie permis de sécuriser l’environnement des intervenants sur ces machines ce qui est une bonne chose. Mais cela nécessitait-il des montants de cet ordre ? Je n’en suis pas sûr.

Jacques Pedrini - Un autre exemple concret : nous nous battons dans un immeuble où la cage d’ascenseur est grillagée, où la sécurité est totale.  Mais, pour 3 millimètres, la cage n’est pas conforme et les copropriétaires doivent changer toute la cage pour répondre au maillage règlementaire. Si nous sommes au-dessus, comme il n’y a pas de tolérance, il faut changer toute la cage. Le coût de la dépense atteint 30.000 euros alors que le risque qu’un enfant de trois mois passe un bâton pour toucher l’ascenseur est quasiment nul.  On entend souvent que le syndic pousse à faire réaliser des travaux… alors que nous sommes là pour faire appliquer des normes et des réglementations…

Renaud Franchet - Le syndic est un interlocuteur pour faire passer l’information, mais il est loin d’être le mieux placé. Lorsque le syndic parle, il n’est pas très audible vis-à-vis des copropriétaires, qui ont l’impression que l’on vend notre service pour prendre des honoraires sur travaux. Ce qui est entièrement faux. Nous essayons de leur expliquer que c’est d’abord et seulement pour l’entretien de leur patrimoine et que les honoraires supplémentaires ne viennent que parce qu’il y a travail supplémentaire. Nous avons donc demandé aux politiques de nous aider.

Mais, sur les audits énergétiques qui sont devenus obligatoires au 1er janvier, il n’y a plus de subvention depuis le 31 décembre. Tant que ce n’était pas obligatoire, les audits étaient subventionnés à hauteur de 60%. Maintenant qu’ils sont obligatoires, ils ne sont plus subventionnés  Les copropriétaires ne comprennent pas. Le problème est qu’on fait du plan climat une obligation de résultat, alors qu’il faudrait que ce soit avant tout une obligation de moyens. Il ne faut pas que le résultat soit le couperet.

Y a-t-il toujours besoin des audits ?

Renaud Franchet - Le syndic est chef d’orchestre mais n’est pas sachant. Il n’est ni thermicien, ni poseur de fenêtres, et nous ne sommes pas assurés pour cette activité. Même si nous avons des notions sur la qualité des immeubles anciens, comme nous n’avons pas compétence, nous ne pouvons pas préconiser tel ou tel type de travaux.

Jacques Pedrini - Les copropriétaires n’accepteront presque jamais de refaire une étanchéité de terrasse si ce n’est pas obligatoire ou s’il n’y a pas de fuite.  Les copropriétaires attendent la mise en place des arrêtés municipaux qui exigent la rénovation des façades. Ils ne vont pas faire l’isolation des murs de façade tant que ne sera pas une obligation de refaire la façade.

Renaud Franchet - Il faut se méfier d’une idée fausse qui consiste à  penser que les copropriétaires feront des économies de charges en réalisant des travaux d’économies d’énergie. Or c’est faux. Ils auront des charges équivalentes mais un sentiment de confort meilleur. En outre, dans une copropriété, tous les copropriétaires ne sont pas égaux face à l’impôt, et donc face aux incitations fiscales. Il vaudrait mieux penser des systèmes pour le syndicat plutôt que de toujours tout ramener à la personne.

Existe-t-il une certaine méfiance entre les copropriétaires et leur syndic ?

Renaud Franchet - Ce que la presse rapporte nous dépasse. Bien sûr, il y a toujours des gens mécontents et pas seulement dans les assemblées générales, mais en fait,  les relations syndics/copropriétaires sont généralement bonnes. Notre principal problème tient au fait que nombre de copropriétaires  ne veulent pas ou ne peuvent pas avoir une vision à moyen-long terme. Ils voient juste dans les travaux une charge de plus, sans réaliser qu’un investissement peut valoriser à terme leur patrimoine.

Mettre en place un fonds travaux est terriblement difficile. Certains n’en voient pas l’intérêt puisqu’ils la mesure où ils pensent revendre ou transmettre à leurs descendants dans deux ans. Certains propriétaires vont transmettre leur logement sans  forcément le vendre. Le logement est devenu  un produit de consommation courante et de plus en plus de personnes achètent pour réaliser une plus-value. C’est particulièrement vrai pour les jeunes générations.

On achète  pour être propriétaire sans forcément avoir conscience du fait que l’on va devenir, dans bien des cas, copropriétaire. N’y a-t-il pas à ce sujet une vraie méconnaissance à ce sujet?

Renaud Franchet - Oui c’est une vraie question pour nous que cette méconnaissance de la copropriété ; nous gérons, par exemple,  un ensemble à Vaulx-en-Velin où les primo-accédants sont assez nombreux. En notre qualité de syndic, nous leur envoyons l’appel de fonds relatif aux charges de l’immeuble ;  le nouveau propriétaire appelle en disant « Monsieur, je ne suis plus locataire ».

Les banques et agents immobiliers n’attirent pas assez, loin s’en faut, l’attention des acquéreurs sur les obligations du copropriétaire ; résultat : nous gérons de nombreuses copropriétés dont les membres ne sont pas très informés. Et notre mission s’inscrit dans la durée contrairement à celle du transactionnaire, et elle n’inclut pas la formation des copropriétaires, d’autant moins que nous n’avons aucun lien juridique avec le copropriétaire pris individuellement.

Certains bailleurs sociaux se désengagent d’un certain bâti pour le vendre à leurs locataires. Les prix sont assez peu élevés et les acquéreurs ayant peu de moyens investissent des appartements dans des immeubles des années 1960-1975 assez énergivores. Dans dix ans, un futur Grenelle va imposer le changement de fenêtres, la réfection des façades, le changement des chaufferies, le tout pour 15.000 à 20.000 euros, pour un certain nombre, ces accédants ne pourront pas payer.  Et, quand bien même le pourrait-ils, qu’ils ne le voudraient pas parce que le copropriétaire n’est souvent qu’un propriétaire frustré qui veut oublier qu’il a non seulement acheté un appartement mais aussi des parties communes avec l’ensemble de ses voisins.

Recueilli par Michel Deprost ( michel.deprost@enviscope.com) et Sylvain Dhuissel (sdhuissel@lyonpoleimmo.com)

» Les règles de la copropriété doivent évoluer






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